Des LIGURES à la BELLE EPOQUE  De - 1000 à + 1830  

                           Occupation Humaine du MASSIF de l’ESTEREL   (Chapitre DEUX)  

 

LES LIGURES * LES ROMAINS

 

             Depuis environ - 800 av JC se répand une peuplade provenant d’Europe centrale, les Celtes qui dispose d’armes et d’outils en fer. Une supériorité militaire certaine qui va influencer les populations autochtones proches du littoral encore à l’âge du bronze. Ces dernières pratiquaient déjà des échanges avec les Phéniciens, les Etrusques puis les Grecs qui les dénomment les Lygiens un terme qui se transformera en Ligures pour les Romains. Toutes ces tribus utilisent un maximum de hauteurs pour y construire des enceintes de pierre à usage défensif pour protéger populations, récoltes et troupeaux. Pour Les Celtes ce type de réalisation est baptisé Oppidum, un ensemble vaste qui se transformera en une agglomération fortifiée, un lieu d’artisans, un marché sur une voie commerçante.              

Le modèle développé par les Ligures ne comporte pas d’habitats, sa surface est réduite, sa situation est dominante au-dessus de simples chemins, ce sont des Castellas ou Castellaras.  

Les possibilités dans l’Esterel pour les Oxybiens qui occupent la région étaient nombreuses : La Forteresse, l’Auriasque, le Bonnet du Capelan, le Barban, le Mont Saint Martin et d'autres,  découverts ou a découvrir. Seul le trés bel ensemble situé sur le Rocher de Roquebrune sur Argens avec sa superbe enceinte de pierre comporte des fonds de cabanes et peut être désigné sous le terme Oppidum.

Bien équipés avec maintenant des armes en fer, les peuplades perturbent les échanges commerciaux, le passage des troupes romaines en train de conquérir l’Espagne puis la Gaule. Elles vont s’attaquer régulièrement aux comptoirs fondés par les Grecs dont Nikaïa et Massalia. En -154 av JC, suite à l’appel au secours de cette ville, les légions infligent une lourde défaite aux tribus regroupées. Néanmoins la traversée de la région reste difficile et pour l’éviter la première grande voie, la via Domitia est construite en -120 av JC et doit passer par le col du Montgenèvre pour relier l’Espagne à Rome. C’est seulement en l’an 13 av-JC que pourra être réalisée une voie plus courte, la via Julia Augusta.  Elle porte logiquement le nom de l’Empereur Auguste qui vient enfin de conquérir ce littoral montagneux.  Pour célébrer sa victoire un Trophée est édifié en l’an 5 à la Turbie (06) et il fait graver sur ce monument tous les noms des 45 tribus vaincues. Celui d’Oxybii figure en bonne place avec celui des Suelteri.  

En – 49 pour des raisons stratégiques, de facilités de communications par la vallée de l’Argens, tout en évitant ces tribus hostiles, recevoir la flotte romaine et les 300 galères capturées lors de la bataille d’Actium, les vainqueurs des Celtes décident de créer un port entre Marseille et Nice. Ce sera au pied de la petite éminence rocheuse qui offre une protection contre les inondations du fleuve côtier et de son affluent le Reyran. Elle s’élève au-dessus de la plaine donnée en récompense par Jules César à ses vétérans de la VIIIe Légion. Ce sera le Forum Julii qui en offrant la possibilité d’une occupation durable, permet de développer un port militaire central dans l’Empire. Pour le terrestre, c’est une étape dans le futur carrefour de voies vers le Narbonnais, la vallée du Rhône, la jonction avec la via Domitia. Climat et lieu agréable, abondance d’eau, les vainqueurs s’installeront pour près 500 ans créant une ville, des monuments et des villas à l’exemple de celle au pied du Roussivau.

             Avec le développement de la religion chrétienne, la communication entre les deux Evêchés, (Fréjus et celui d’Antibes qui sera déplacé à Grasse en 1243) s’intensifie et l’Esterel, bien placé voit passer les pèlerins allant à Rome ou bien en sens contraire vers St Jacques de Compostelle. Pèlerinage aussi plus qu’important, la grotte sous le Pic du Cap Roux occupée par St Honorat qui devient la Sainte Beaume (de l’Esterel). En parallèle, juste en dessous, la grande grotte dite de l’Hôspital sera aménagée avec un escalier taillé dans la pierre pour accéder à un étage par une porte dont il reste l’encadrement, le plancher quant a lui a disparu. Suivant les ermites, cultures et arbres fruitiers sont exploités. L’ermitage, les pèlerinages se poursuivront jusqu’à nos jours Par extension, s’est développée l’abbaye de Lérins. Les pèlerins y affluent, font pénitence, pieds nus sur les rochers, car s’y rendre permet de bénéficier des mêmes indulgences qu’un voyage en Terre Sainte. Pape, Roi, nobles et bien des fidèles y passeront faire retraite.

 

MOYEN AGE – REVOLUTION – LES PREMIERS VOYAGEURS

 

              Suivront les arrivées de peuples barbares et les incursions des Sarrazins. Pour se défendre, le Moyen Age sera la période de construction de Castrum. (Mandelieu fin IX°) en partage avec les évêques de Fréjus et les princes évêques d’Antibes. Ils empruntent l’ex branche de la voie Aurelia et le col au Nord du Cap Roux devient col de l’Evêque. Si les déplacements sont plutôt effectués par la mer entre Toulon et Nice puis Gènes, pour les voyages terrestres c’est cet itinéraire qui rejoint et suit le bord de mer qui est préféré.

              Périodes plus calmes fin X° et XI° siècle mais suivies par des séquences difficiles dues aux guerres et épidémies de peste. Pour cela en 1390, sur le castrum de Mandelieu est construit le château de la Napoule. Le Marquisat (947) devenu comté de Provence est rattachée à la France (1481). En raison de sa situation proche de la « frontière » avec les territoires appartenant à la Maison de Savoie (1033- 1860) le Massif de l’Esterel est un lieu de passage obligé et en conséquence très fréquenté. Malheureusement il y a aussi les « dommages collatéraux » consécutifs aux guerres de religion lors du passage d’armées qui n’hésitent pas à mettre le feu aux forêts pour en chasser « les ennemis ».  (1524 Connétable de Bourbon, 1536 Charles Quint (St Jean de l’Esterel), 1590 Duc de Savoie, 1707 Prince Eugène). (Ils seront imités en 1943 par les Allemands). Mouillage forain certainement dans la baie d’Agay des galères et navires de l’alliance « d’opportunité franco – turque » entre François 1er et le corsaire Barberousse à l’occasion du siège de Nice (1542) puis lorsque la flotte Ottomane repasse pour prendre son hivernage à Toulon (1543). Au final une période de l’histoire régionale très intéressante pour le Massif avec le commerce et la contrebande dont celui du sel pendant 430 ans. Conséquence, ne manqueront pas les contrebandiers, les évadés du bagne de Toulon ou les voleurs.

               C’est une des raisons pour laquelle les premiers « voyageurs » préfèrent utiliser le bateau (des galères souvent) pour se rendre de Toulon vers Antibes, s’arrêtant parfois à Fréjus ou plus exactement en utilisant le port de pêcheurs du petit village de Saint Raphael. Alors que les déplacements étaient d’abord le fait de religieux, de pèlerins, de commerçants (sans oublier militaires, armées), une forme de tourisme de passage se développe à partir de 1500 et s’amplifie à partir de 1700. Ce qui sera qualifié de Grand Tour par les historiens du milieu du xx° siècle est ce « tour culturel vers l’’Italie, » qui se doit d’être réalisé par l’élite de toute l’Europe ». Nobles, Gens de Bonne Société, Savants, Ecrivains, Artistes, Amateurs d’art, Beaucoup de jeunes dont certains en profitent pour se divertir.  S’instruire, connaitre et décrire villes, monuments, flore, mœurs, climats, paysans et bourgeois font l’objet de lettres descriptives, de journaux personnels et de publications. Un bel exemple est le savant, l’astronome Pierre Gassendi (1592 -1656). Venu de Digne, il passera à Fréjus (1635) et va décrire avec précisions dans une lettre, la ville et les curiosités du Haut Var. Sa relation de l’aqueduc et surtout des travaux effectués pour tailler le passage de l’eau dans la falaise près de Mons, y compris en expliquer les problèmes rencontrés, est d’une remarquable précision. Ses explications sur la « Roche Taillée » sont toujours actuelles.

               Pour   tous ces riches voyageurs, Il devient nécessaire de prévoir des étapes sur le mauvais chemin qui reprenait l’autre tracé de la via Aurelia.  A la bonne distance soit 10 lieues, entre Fréjus et Mandelieu, bien qu’au Nord, un relais est nécessaire pour les voyageurs et leurs suites.  Il faut aussi des écuries pour les mulets des chaises à deux, pour les chevaux des berlines, calèches, diligences. En conséquence, on reconstruit une auberge aux Adrets (1653). Elle devient bientôt un Relais de Poste avec les travaux d’améliorations, la création des Routes Royales voulues par le secrétaire d’Etat de Louis XIV°, Jean Baptiste Colbert (1619-1683). Des travaux importants dans le Massif, un pont sur le torrent de la Cabre sont réalisées vers 1760.

             Un personnage s’y arrête volontiers pour le couvert et le gite bien plus confortable que sa grotte proche du Mont Vinaigre, c’est le célèbre brigand Gaspard de Besse (sur Issole) (1757- 1781).  

             Remarquable le passage du physicien, géologue, botaniste, voici le savant Horace-Bénédict de Saussure (1740-1799). Il est celui qui avait promis 27 ans plus tôt (1760) une prime à qui trouverait le chemin pour gravir le Mont Blanc.  Un an après la réussite de la première ascension (08/08/1786), maintenant « que l’on connait le chemin* », le 3/08/1787, il fait installer sa table de travail sur le sommet tant convoité Il y pratique mesures et expériences pendant 4 heures !!  Juste avant cet exploit scientifique (et physique) c’était comme excursionniste, venant de Gènes et retournant en Suisse, qu’il avait traversé avec sa famille l’Esterel.  S’il décrira très bien le passage où guettent les malandrins et leurs méthodes, ce précurseur de la géologie moderne s’interroge et s’étonne sur la nature exacte des roches qu’il étudie : sont-elles volcaniques ?  Disposant de quelques jours à Fréjus, il poursuit ses travaux va dessiner une pierre à la forme et au contenu inaccoutumés. Elle sera baptisée plus tard : Lithophyse.  Il pousse ses recherches notant paysages, roches et flore « de l'Agaï à 1'Herrnitage* » jusqu’à la « Sainte Beaume » « et grimpe « difficilement » en compagnie de l’occupant de l’époque, le Frère Calvi de Menton qu’il surnomme « l’Hermite des Ciines'qui dominent le Cap Roux *». Nous sommes le 26 avril 1787 - peut-être en est-il le premier ascensionniste ? « … mais je crois qu'il faut la nommer la montagne du Cap Roux... *» Avec son baromètre et l’hygromètre qu’il vient d’inventer, il calcule sa hauteur à « 231 toises* » soit 450m (l’IGN retient 459m). Il appliquera la même méthode quatre mois plus tard pour déterminer et proposer l’altitude de 2.450 toises (4.775m) pour le Mont Blanc (4.808m) soit moins de 40m d’erreur (!). (*** Source gallica.bnf.fr)

              1790 : Naissance du département qui prend le nom du fleuve côtier le VAR qui forme la frontière avec les Etats de Savoie le comté de Nice. La révolution engendre une période plutôt sanglante où s’opposent républicains et royalistes. Les guerres sont mal vécues car elles provoquent des réquisitions d’hommes, de nourritures, de monnaies. C’est aussi le retour le long des côtes des flottes anglo-espagnoles. Une bataille navale (12/1813), suivie par un débarquement donnera son nom à la calanque des Anglais. Après sa campagne d’Egypte, le Général Bonaparte débarque en 1799 à St Raphaël mais c’est l’Empereur Napoléon 1er qui s’embarque en 1814 depuis Fréjus pour son entamer exil sur l’ile d’Elbe.

             Après le ralentissement des passages provoqué par les guerres de la Révolution et de l’Empire, le retour au calme vers 1830, facilite un nouvel avenir fait de la découverte et des besoins d’un « Tourisme hivernal ». On va désormais résider pour profiter de la douceur du climat et pour cela il faut construire des villas et des hôtels (Cannes 1835). Un petit port va devenir une station balnéaire très à la mode :  St Raphael (1836).

 

Christian CHABERT

  Occupation Humaine du MASSIF de l’ESTEREL (Chapitre TROIS)

 ***  de la BELLE EPOQUE à LA PREMIERE GUERRE MONDIALE

 

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